L'Antre de la Bête s'intéresse à une composante fort méconnue du western européen : le "western mamaligă", en provenance de Roumanie.
Le « western mamaligă », en voilà un drôle de nom ! La postérité a doté le western fait en Roumanie de la particule « mamaligă », nom d’un délicieux plat traditionnel roumain à base de polenta molle arrosée de fromage blanc, prolongeant ainsi cette tradition à la fois amusante et grotesque qui consiste à désigner les westerns produits ailleurs qu’aux Etats-Unis par des spécialités culinaires. On connaissait en effet le « western spaghetti » en Italie (une expression honnie par Sergio Leone, qui aurait eu cette formule ironique « Quand j’ai entendu cette expression, j’ai crû qu’on utilisait un spaghetti en guise de lasso »), le « western paella » en Espagne, le « western choucroute » en Allemagne de l’Est, le « western soja » en Chine, le « döner western » en Turquie, mais que sait-on du « western mamaligă » ? Pas grande chose, pour ne pas dire presque rien, tant le genre ne compte que très peu de représentants et n’a jamais dépassé les frontières de la Roumanie. Selon le Dictionnaire du film roumain de fiction de l'érudit Grid Modorcea, trois films appartiendraient à ce sous-genre, que l'ouvrage préfère désigner par l’appellation plus juste d’ « eastern ». Le premier représentant date de 1977, au moment où le western européen connaissait une période de franc déclin. Profetul, aurul şi Ardelenii (littéralement Le prophète, l’or et les Transylvains, on devine d’où vient l’influence), réalisé par un cinéaste chevronné, Dan Piţa, conte l’histoire de deux frères originaires de Transylvanie qui partent en Amérique à la recherche de leur troisième frangin, émigré depuis longtemps. Ils débarquent dans une ville inconnue, Cedar City, où leur ignorance de la langue anglaise leur vaut quelques ennuis. Voyant la photo de leur frère partout, les deux aventuriers pensent que ce dernier est devenu un homme important, mais découvrent que le frérot s’est mué en justicier contre un prophète mormon s’appropriant l’or des chercheurs.
Selon le critique local Tudor Caranfil*, « ce western respecte les règles du genre (…), où ne manquent ni les Indiens vindicatifs, ni les Noirs fidèles, ni les Mormons dévots, ni les émigrants venus du monde entier, ni les salauds et les justiciers (…), mais ce qu’il manque malgré tout, c’est la verve d’un réalisateur, sa vocation sincère pour le divertissement ». Il est vrai que le choix de Piţa, cinéaste cérébral, pour ce spectacle grand public est assez surprenant, toujours est-il que le gros succès en salles du film (près de 7 millions de spectateurs) engendrera deux suites, interprétées par les mêmes comédiens : Artista, Dolarii şi Ardelenii (L’artiste, les dollars et les Transylvains) en 1979, réalisé cette fois par Mircea Veroiu, où les trois frères, n’ayant toujours pas quitté l’Amérique, tombent entre les griffes d’une redoutable entraîneuse de saloon qui en veut à leur dollars, et Pruncul, Petrolul şi Ardelenii (Le marmot, le pétrole et les Transylvains) en 1980, signé à nouveau Dan Piţa, où l’un des trois frères, marié à une Américaine et père d’un enfant, entre en conflit avec une famille de Hongrois qui détiennent le monopole de l’eau. Les deux familles s’unissent pour lutter contre des bandits et mettent à jour un puit de pétrole. Un troisième volet qui, selon Caranfil, « diminue l’élan railleur du premier volet, prenant au sérieux le genre aventureux avec lequel Piţa n’a aucune affinité ». Les 5 millions d’entrées n’ont pas suffi à convaincre les producteurs de poursuivre dans ce genre original et rentable.
Ce sont là, à ma connaissance, les trois seuls représentants du western roumain. A ce jour, il n’existe hélas, pour le spectateur français non roumanophone, aucun moyen de visionner ces raretés, pourtant fréquemment diffusées à la télévision roumaine. Un seul des trois films, le premier, a fait l'objet d'une édition en DVD par le CNC local (visuel plus haut). Un DVD strictement réservé au marché intérieur puisque aucun sous-titrage n’y figure. Il est toutefois possible d'en visionner un extrait grâce au site Veoh.com (lien par ici). Il serait judicieux qu’un de nos éditeurs indépendants se penche sur la question.
Le « western mamaligă », en voilà un drôle de nom ! La postérité a doté le western fait en Roumanie de la particule « mamaligă », nom d’un délicieux plat traditionnel roumain à base de polenta molle arrosée de fromage blanc, prolongeant ainsi cette tradition à la fois amusante et grotesque qui consiste à désigner les westerns produits ailleurs qu’aux Etats-Unis par des spécialités culinaires. On connaissait en effet le « western spaghetti » en Italie (une expression honnie par Sergio Leone, qui aurait eu cette formule ironique « Quand j’ai entendu cette expression, j’ai crû qu’on utilisait un spaghetti en guise de lasso »), le « western paella » en Espagne, le « western choucroute » en Allemagne de l’Est, le « western soja » en Chine, le « döner western » en Turquie, mais que sait-on du « western mamaligă » ? Pas grande chose, pour ne pas dire presque rien, tant le genre ne compte que très peu de représentants et n’a jamais dépassé les frontières de la Roumanie. Selon le Dictionnaire du film roumain de fiction de l'érudit Grid Modorcea, trois films appartiendraient à ce sous-genre, que l'ouvrage préfère désigner par l’appellation plus juste d’ « eastern ». Le premier représentant date de 1977, au moment où le western européen connaissait une période de franc déclin. Profetul, aurul şi Ardelenii (littéralement Le prophète, l’or et les Transylvains, on devine d’où vient l’influence), réalisé par un cinéaste chevronné, Dan Piţa, conte l’histoire de deux frères originaires de Transylvanie qui partent en Amérique à la recherche de leur troisième frangin, émigré depuis longtemps. Ils débarquent dans une ville inconnue, Cedar City, où leur ignorance de la langue anglaise leur vaut quelques ennuis. Voyant la photo de leur frère partout, les deux aventuriers pensent que ce dernier est devenu un homme important, mais découvrent que le frérot s’est mué en justicier contre un prophète mormon s’appropriant l’or des chercheurs.
Selon le critique local Tudor Caranfil*, « ce western respecte les règles du genre (…), où ne manquent ni les Indiens vindicatifs, ni les Noirs fidèles, ni les Mormons dévots, ni les émigrants venus du monde entier, ni les salauds et les justiciers (…), mais ce qu’il manque malgré tout, c’est la verve d’un réalisateur, sa vocation sincère pour le divertissement ». Il est vrai que le choix de Piţa, cinéaste cérébral, pour ce spectacle grand public est assez surprenant, toujours est-il que le gros succès en salles du film (près de 7 millions de spectateurs) engendrera deux suites, interprétées par les mêmes comédiens : Artista, Dolarii şi Ardelenii (L’artiste, les dollars et les Transylvains) en 1979, réalisé cette fois par Mircea Veroiu, où les trois frères, n’ayant toujours pas quitté l’Amérique, tombent entre les griffes d’une redoutable entraîneuse de saloon qui en veut à leur dollars, et Pruncul, Petrolul şi Ardelenii (Le marmot, le pétrole et les Transylvains) en 1980, signé à nouveau Dan Piţa, où l’un des trois frères, marié à une Américaine et père d’un enfant, entre en conflit avec une famille de Hongrois qui détiennent le monopole de l’eau. Les deux familles s’unissent pour lutter contre des bandits et mettent à jour un puit de pétrole. Un troisième volet qui, selon Caranfil, « diminue l’élan railleur du premier volet, prenant au sérieux le genre aventureux avec lequel Piţa n’a aucune affinité ». Les 5 millions d’entrées n’ont pas suffi à convaincre les producteurs de poursuivre dans ce genre original et rentable.
Ce sont là, à ma connaissance, les trois seuls représentants du western roumain. A ce jour, il n’existe hélas, pour le spectateur français non roumanophone, aucun moyen de visionner ces raretés, pourtant fréquemment diffusées à la télévision roumaine. Un seul des trois films, le premier, a fait l'objet d'une édition en DVD par le CNC local (visuel plus haut). Un DVD strictement réservé au marché intérieur puisque aucun sous-titrage n’y figure. Il est toutefois possible d'en visionner un extrait grâce au site Veoh.com (lien par ici). Il serait judicieux qu’un de nos éditeurs indépendants se penche sur la question.
* Dictionnaire des Films Roumains, par Tudor Caranfil, père de Nae Caranfil, réalisateur de Philanthropique et Asphalt Tango.
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