jeudi 22 mai 2008

Nico Mastorakis, le Grec fou d'Hollywood

Précision : pour comprendre cet article, il convient d'abord de lire le précédent, "Island of Death : perversions à la grecque".

Après le succès commercial de Island of Death, Nico Mastorakis passera essentiellement la suite de sa carrière aux Etats-Unis, enchaînant avec un bonheur inégal les films de genre à petit budget qu’il scénarise et produit lui-même. L’apogée qualitative de sa filmographie américaine est atteinte en 1988 avec Nightmare at noon, SON chef-d’œuvre, une série B d’action qui selon moi compte parmi les meilleures des années 80, racontant comment l’infection d’un lac par des scientifiques transforme les habitants d’une petite ville du Middle West en maniaques sanguinaires. Séquences gore réjouissantes, cascades et effets pyrotechniques à foison, casting de gueules (George Kennedy, Bo Hopkins, Brion James, Wings Hauser), Mastorakis ne fera jamais aussi bien, même lorsque deux ans plus tard il s’adjugera Oliver Reed et cette endive de Brian Thompson pour les besoins de Hired to Kill, où comment un mercenaire maquillé en photographe de mode s’envole pour l’Amérique du Sud afin de libérer un leader politique, avec pour seule escorte sept superbes mannequins experts en combat. Un tel synopsis laissait augurer le meilleur, hélas l’ensemble est d’une mollesse et d’un ennui terribles.

Quelques années auparavant, le Grec fou avait aussi tâté du tueur en série avec le sympathique Blind Date et du "film de survie pour jeunes" avec un pathétique Heros Boys. Dans le premier, Joseph Bottoms est un publicitaire américain travaillant à Athènes qui, après avoir perdu la vue dans un accident, se fait implanté un mini-ordinateur dans la rétine lui permettant de voir le monde comme un jeu vidéo. C’est à ce moment-là qu’il assiste au meurtre d’une jeune fille commis par un tueur qui sévit dans la ville. Malgré l’argument scientifique quelque peu tiré par les cheveux, la chose se regarde sans déplaisir. Kirstie Alley y fait ses débuts et l’on y entraperçoit Valeria Golino en strip-teaseuse. Dans le second, un groupe de jeunes écervelés part faire du camping sauvage et, par une nuit d’orage, se réfugie dans une maison où des bouseux psychopathes lui font des frayeurs. L’horreur se résume à un cadavre de femme dans une caisse. Mastorakis a réalisé d'autres films que je n'ai pas eu la chance de voir. Il a notamment dirigé Keir Dullea (déjà dans Blind Date) et Adrienne Barbeau dans The next one, Meg Foster, Wings Hauser et David McCallum dans The Wind et Nastassja Kinski dans ce qui demeure aujourd'hui son dernier fait d'arme, .com for murder. C'était en 2002.

Island of Death : perversions à la grecque

Island of Death fait partie de ces films maudits qui n’ont toujours pas été montrés dans nos vertes contrées. En France, la bête reste inédite en salles, en vidéo et en DVD. Il faut donc se tourner vers l’import pour y goûter.

S’intéresser à Island of Death, c’est revenir aux sources de la filmographie d’un faiseur de séries B qui, dans les années 80, était l’égal d’un Albert Pyun, d’un Charles Band ou d’un Armand Mastroianni. De son Athènes natale, Nico Mastorakis a très tôt raisonné en termes d’argent et de carrière internationale. Après s’être fait la main sur des programmes télévisés, il entreprend en 1975 la réalisation d’un premier long-métrage. Le but avoué étant de faire du blé, il s’inspire du succès de Massacre à la tronçonneuse pour produire un film par cher qui peut rapporter gros. Tourné en anglais avec un casting international, fondé sur la violence, le sexe et la perversion, Island of Death fait son petit effet, glanant rapidement le statut d’œuvre culte et provoquant le courroux des censeurs qui l’interdisent dans certains pays (dont le nôtre). Image Entertainment a distribué depuis les États-Unis une galette dépourvue de visuel mais néanmoins fortement racoleuse. "The movie that the censors don’t want you to see" annonce fièrement la jaquette, tandis qu’au verso un commentaire renchérit : “We regret that we can’t show scenes from the movie on the cover. The content is too strong to be displayed”. On ne pourra pas dire que nous ne sommes pas prévenus !

Deux touristes anglais, Christopher et Celia, débarquent sur l’île grecque de Mykonos. Ils sont beaux, ils sont jeunes, ils s’aiment. On se dit que les malheureux vont être alors poursuivis par des insulaires sauvages qui les tortureront avant de les tuer et de les dévorer. Que nenni ! Car en réalité, nos deux Anglais sont de fieffés psychopathes qui ont décidé de purifier l’île de sa débauche, non sans s’y vautrer complaisamment. Sitôt le premier forfait de Christopher accompli (il sodomise un chevreau avant de l’égorger), le film devient un catalogue de perversions assez hallucinant. Un artiste français meurt asphyxié après avoir été contraint de boire un pot de peinture, un couple d’homosexuels est massacré, une lesbienne a le visage brûlé, une vieille cochonne se fait uriner sur la figure, un hippie est occis d’un coup de harpon, un détective est pendu à l’aile d’un avion en vol, une jeune femme est transpercée d’un coup de serpe. Ces horreurs finiront par se retourner contre le couple qui, en tentant de fuir la police, tombera sur plus sadique que lui en la personne d’un vieux berger lubrique. Totalement imprégné de l’imagerie décomplexée des années 70, rythmé par de douces mélodies langoureuses évoquant Demis Roussos période Aphrodite’s Child, Island of Death suscite un véritable malaise par le décalage entre l’atrocité des actes commis et le décor enchanteur, entre la perversité extrême du couple (elle photographie pendant que lui tue) et leur apparente banalité. Mastorakis (qui interprète aussi un flic) y déploie une maîtrise parfaite du champ/contre-champ et trompe la routine que pourrait créer cette succession de scènes déviantes par des astuces de montage. Le cinéaste grec nous apprend au cours du passionnant entretien qui complète cette édition que le comédien Bob Behling s’est suicidé quelques années après le tournage.

mardi 20 mai 2008

"Ten Minutes Older" pour 15 cinéastes de prestige

Retour sur une collection de courts-métrages intitulée Ten Minutes Older : The Cello & The Trumpet, qui n'a pas eu la notoriété méritée malgré les cinéastes prestigieux réunis pour l'occasion : Bernardo Bertolucci, Mike Figgis, Jiri Menzel, Istvan Szabo, Claire Denis, Volker Schlöndorff, Michael Radford, Jean-Luc Godard, Aki Kaurismäki, Victor Erice, Werner Herzog, Jim Jarmusch, Wim Wenders, Spike Lee et Chen Kaige. Quinze auteurs réunis non pas autour d'un sujet commun, mais d'une durée commune : dix minutes. .


Coproduit en 2002 entre l'Allemagne et le Royaume-Uni, Ten Minutes Older est divisée en deux parties, The Cello et The Trumpet, mais les films évoqués ci-après le sont dans le désordre. Le thème de l’étranger, ou plutôt de la difficulté d’être étranger, est au centre de deux films : celui, totalement indigeste, de Bertolucci, qui voit Valeria Bruni-Tedeschi recueillir un clandestin bangladais ou pakistanais, l’épouser, lui faire deux mômes, avant que le charmant monsieur, désespéré d’avoir balancé sa voiture neuve dans un ravin, s’en aille retrouver un vieillard joueur de pipeau qu’il avait abandonné sous un arbre à son arrivée en Italie ; et celui de Claire Denis (baptisé Vers Nancy), dont on ne saurait trop dire s’il est fictionnel ou documentaire, basé sur une discussion dans un train entre une jeune femme et le philosophe Jean-Luc Nancy (d‘où l‘ambiguïté du titre), discussion polémique portant sur l’accueil des étrangers en France. Du blabla agréable à écouter mais sans grand intérêt. La réalisatrice fait néanmoins preuve d’une autodérision bienvenue quand, au terme du débat, Alex Descas intervient et dit, parlant du voyage "C‘était rapide et agréable", avant que Nancy ne lui rétorque "Oh, tout de même un peu long ! "

Comme à son habitude, Godard jongle aussi entre la fiction et le documentaire en utilisant le même procédé que pour ses Histoire(s) du Cinéma, à savoir des extraits de films mélangés à des sons extra-diégétiques et à des bribes de phrases inscrites sur fond noir. Une douche froide expérimentale, aussi fascinante que grotesque. L’Américain Mike Figgis donne également dans l’expérimental en développant le concept complexe de l’écran divisé en quatre, déjà employé pour les besoins de son précédent Time Code. En dehors de cette coquetterie, la chose, qui abuse des ralentis et des effets de flou, ne propose rien de transcendant et se permet même le luxe d’être ennuyeuse.

Certains cinéastes ont clairement opté pour l’approche documentaire. C’est le cas, par exemple, d’Herzog qui nous refourgue un condensé de vieilles images tournées en Amazonie, probablement à l’époque de Fitzcarraldo, sur une tribu locale menacée d’extinction, affublé d’un nouveau commentaire en anglais. Intéressant mais complètement décousu. Quant à Spike Lee, il joue les Michael Moore du pauvre en allant interviewer les protagonistes de la campagne perdue d’Al Gore en 2000 (on n’en sort pas), histoire de marteler encore un bon coup que Bush Jr a triché (ouhh, le vilain !). Un montage rapide de séances d’entretiens ineptes, à peine perturbé par quelques images d’archives. Digne d’un reportage de CNN… D’autres metteurs en scène ont en revanche choisi la voie de la fiction. Passons sans peine sur l’opus de Michael Radford, bizarrerie futuriste qui voit un jeune astronaute, de retour sur Terre, rendre visite à son fils devenu un vieillard mourant. Pas médiocre, simplement transparent, à l’image de la carrière de Radford dont le seul titre de gloire reste à ce jour le surestimé Il Postino. Le Chinois Chen Kaige signe un court humoristique et émouvant ayant pour personnage central un illuminé qui rêve d’une maison sur un terrain vague, et qui embauche pour ce faire un quatuor d’ouvriers quelque peu surpris de devoir transporter des objets fictifs, donc invisibles.

Vingt ans après Paris, Texas, Wenders est toujours aussi passionné par le désert américain, la preuve avec un court très stylisé et réglé comme une horloge, dans lequel un jeune automobiliste voit sa raison vaciller au fil des kilomètres parcourus, sous un soleil de plomb, sur les longues nationales texanes. Kaurismäki réunit à nouveau les deux personnages de L’homme sans passé. Lui sort de prison, elle travaille dans un restaurant, il vient l’arracher à son quotidien morne pour filer vers la Sibérie. Délicieusement pince-sans-rire. Dans un noir et blanc délavé, le revenant Victor Erice met en scène un accouchement dans une hacienda, non sans s’être au préalable attardé, par de longs plans fixes crispants, sur la monotonie pesante qui règne en ce lieu. Oubliable...

Aussi surprenant soit-il, seuls deux cinéastes ont choisi de traiter la situation dans sa durée réelle : le Hongrois Istvàn Szabo qui, avec un sens de l‘économie et de la dramaturgie remarquable, montre comment, en l’espace de dix petites minutes, une vie de couple jusque là heureuse peut basculer dans le drame. Elle a tout préparé pour leur anniversaire de mariage, lui rentre bourré après une soirée entre amis, il est violent, met la maison sans dessus dessous, elle le poignarde accidentellement en tentant d’éviter ses coups ; et Jarmusch, sobre et tranquille, qui décrit les dix minutes de pause d’une actrice (Chloë Sevigny) entre deux scènes, dans sa caravane, attendant qu’on vienne la chercher. .

Concluons par les deux œuvres les plus enthousiasmantes de ce programme. Tout d’abord celle du Tchèque Jiri Menzel, un grand parmi les grands que l’on croyait disparu pour de bon et qui nous revient avec un court-métrage doucereusement mélancolique tourné dans de séduisantes teintes sépia. Menzel se contente de peu de choses : un montage de petites séquences campagnardes, parfois même de photographies, pour évoquer le temps qui passe, au rythme d’une partition fanfaronne. Mais c’est l’opus de Volker Schlöndorff qui emporte finalement ma complète adhésion. Dans un camping quelque part en Allemagne, le dîner d’une famille on ne peut plus teutonne - le père en short et en sandales qui fait griller les saucisses, la mère maquillée comme un cadavre (interprétée par Irm Hermann, ancienne égérie de Fassbinder) - tourne au vinaigre lorsque la fille y convie son fiancé, Noir, sans doute Américain, et de surcroît fervent adversaire de l’alcool. La scène est observée et commentée par un moustique. Un régal d’humour caustique.

Jamais distribuée en salles, cette compilation a été projetée dans quelques festivals et certains segments ont été individuellement diffusés à la télévision. Il existe toutefois un DVD américain pour se faire une large idée du contenu.

lundi 19 mai 2008

1982 : Quand les cathos cassaient du bis

1982 fut une grande année. Pas seulement parce qu'elle vit mon arrivée en ce bas monde, mais aussi parce qu'elle fut incroyablement riche en "bis". D'où l'intérêt, vingt-six ans après, d'aller fouiner dans les archives pour découvrir ce que les critiques de l'époque pensaient de ces films auxquels quelques esprits malades continuent, encore aujourd'hui, de vouer un culte. A ce jeu, le bissophile endurci s'amusera ou s'indignera des appréciations données aux fleurons de la cuvée 1982 par les Fiches du Cinéma. Cette publication annuelle, qui existe encore*, était en ce temps-là éditée par la fort respectable association Chrétiens-Médias ("crétins-médias" me soufflent les mauvaises langues, allons bon...) et les films qui y étaient chroniqués étaient soumis aux appréciations de l'Office Catholique Français du Cinéma. On devine bien sûr l'effroi suscité chez ces cul-bénis de la critique bien-pensante par des films tels que L'Avion de l'apocalypse de Lenzi, Virus Cannibale de Mattei ou encore Anthropophagous de D'Amato (une grande année, qu'on vous dit !). Voilà par exemple le commentaire particulièrement constructif adressé à ce dernier : "Un film complètement nul sur tous les plans. Une accumulation d'intentions particulièrement horribles. Un propos nocif se dégage d'une atmosphère de violence et de sadisme". L'expression "film complètement nul" semble être très appréciée des rédacteurs puisque c'est ainsi qu'est également qualifié Virus Cannibale (pour le coup, ils n'ont peut-être pas tort). Certes il n'est guère étonnant qu'un comité religieux ait quelque mal à supporter la vision d'un cannibale dévorant ses propres entrailles, aussi nous ne tiendrons point rigueur de ces critiques faciles adressées à des bandes dont le statut de "chefs d'œuvres" est parfois même contesté parmi les amateurs. En revanche, oser dire de Massacre à la tronçonneuse que c'est "un film techniquement bâclé, très lent dont seule la fin est horrifique" relève du sacrilège pur et simple. En fait, c'est assez simple, tous les films relevant de l'exploitation ou comportant des scènes gore sont épinglés sans rémission : Blue Holocaust de D'Amato est un "film médiocre sur tous les plans et profondément malsain", La maison près du cimetière de Fulci (un chef-d'oeuvre pourtant) est "dépourvu de mise en scène, de qualités artistiques, d'originalité et de suspense" (rien que ça !), Maniac de William Lustig est "un film d'horreur totalement bâclé" qui fait montre d'une "exploitation honteuse de la violence et de la bestialité", Terreur à l'hôpital central de Jean-Claude Lord contient "un scénario invraisemblable (...) prétexte à une réalisation médiocre", Exterminator de James Glickenhaus est "un film voyeur, malsain, bâclé et très médiocrement interprété". Alors que les films de Rohmer, Varda, Herzog et Fassbinder figurent parmi ceux qui ont marqué l'année, le cinéma de genre de série B s'en prend plein la tronche. Les commentaires ne sont pas plus valorisants en ce qui concerne L'incroyable alligator de Lewis Teague, Cannibal Ferox de Lenzi, Les tueurs de l'éclipse de Ed Hunt, Class 1984 de Mark Lester, La ferme de la terreur de Craven, Carnage de Tony Maylam, Cauchemar à Daytona Beach de Romano Scavolini et Ilsa, tigresse du goulag de Jean Lafleur... Face à un tel acharnement, des messieurs nommés Pierre Charles, Jean-Pierre Putters ou Philippe Ross s'érigeaient en défenseurs d'un cinoche mal-aimé des ayatollahs de l'intelligentsia critique. Leurs héritiers sont aujourd'hui aux commandes de fanzines (Medusa, Diabolik Zone) ou de sites Internet (Psychovision, Zone Bis, Nanarland, 1Kult, Club des monstres)...

* Ayant commis l'imprudence de leur commander un jour quelques vieux exemplaires, je reçois désormais leur brochure chaque année, me suppliant de leur faire un don afin de permettre à la publication de survivre. On aura tout vu...

vendredi 16 mai 2008

John Phillip Law s'est éteint à l'âge de 70 ans

L'excellent blog 1Kult a été le plus prompt pour nous apprendre une bien triste nouvelle : la disparition, à l'âge de 70 ans, du distingué John Phillip Law. Figure incontournable du film populaire européen, l'Américain John Phillip Law aura illuminé de son sex-appeal et de son regard pénétrant des œuvres aussi célèbres et diverses que le psychédélique Barbarella de Roger Vadim (où il fait tourner la tête de Jane Fonda), Danger: Diabolik de Mario Bava (dans lequel il prête sa haute stature au fameux antihéros de fumetti), le western crépusculaire La mort était au rendez-vous de Giulio Petroni (il y incarne un cowboy assoiffé de vengeance, aidé dans son entreprise par Lee Van Cleef) et deux excellents thrillers de l'Anglais Peter Collinson, La nuit de la peur et La chasse sanglante. Ayant construit l'essentiel de sa carrière en Italie, il avait fini par s'égarer, à l'image de nombre de ses compatriotes, dans le cinéma d'exploitation le plus radical. Une seconde carrière qu'il n'a jamais renié, bien au contraire, comme en témoigne son long entretien dans un numéro de Mad Movies. De cette filmographie chérie par quelques amateurs éclairés, on peut citer le troublant Voyeur Pervers où, en locataire mystérieux, il déambule en tenue d'Adam pour le plaisir décadent d'un vieillard omnipotent (Fernando Rey), le méconnu Coup de Force du mercenaire Fabrizio De Angelis, efficace film d'action sur fond de guérilla en Amérique Latine dont il est le seul nom connu au générique, La forêt explosive, film de jungle tourné en Indonésie où il partage l'affiche avec la vedette locale Barry Prima et un Chris Mitchum inexistant, et Night Train to Terror, où il anime un premier sketch très sanglant fondé sur une histoire de secte cannibale. Devenu une icône, il a continué jusqu'à son dernier souffle d'apparaître ça et là pour le compte de cinéastes de séries B, tels que Sergio Stivaletti (I tre volti del terrore) et John Carl Buechler (Curse of the Forty-Niner). Comédien racé, félin, discret, John Phillip Law aurait probablement eu d'autres rôles à sa mesure. Sans doute que Tarantino lui-même aurait fini par "l'exhumer" un de ces jours.

jeudi 15 mai 2008

Reconsidérer le terrorisme en Russie

L'assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa, qui pour certains porte la marque du FSB, l'ex-KGB auquel a appartenu Poutine, a renforcé l'idée que, dans une Russie pourtant en proie aux séparatismes de tous poils, c'est bien l'État qui est le véritable "terroriste". J'ai eu l'occasion de voir récemment trois documentaires plus anciens qui traitent à leur manière de la nature complexe du terrorisme en Russie, avec l'actualité comme toile de fond.

Au mois de mars dernier s'est tenue à Genève la sixième édition du Festival du Films sur les Droits Humains. La Française Manon Loizeau y a présenté un documentaire d'une demi-heure en hommage à la journaliste russe Anna Politkovskaïa, fameuse voix d'opposition au régime totalitaire de Vladimir Poutine, assassinée en 2006. Reporter russophile, Manon Loizeau a réalisé nombre de reportages sur les conflits politiques et ethniques qui affectent la Russie depuis l'éclatement de l'Union Soviétique. L'un d'eux, Meurtres en série au pays de Poutine, consacré à l'affaire Litvinenko, a été diffusé sur Arte au mois de février. Pour Retour à Beslan, réalisé il y a trois ans, Manon Loizeau a mené une enquête sérieuse, directe et efficace à Moscou et en Ossétie pour tenter de comprendre ce qui a bien pu, en ce triste 3 septembre 2004 où un commando tchétchène a pris en otages les occupants d’une école de Beslan, conduire à la mort de plus de 300 personnes, dont une moitié d’enfants. Entre les ruines du bâtiment, la réalisatrice interroge les survivants du carnage, tandis que dans la capitale elle rend visite aux rares journalistes indépendants qui osent encore affirmer la responsabilité de l’armée dans la tournure catastrophique des évènements.

La chaîne britannique HBO est à l’initiative de nombreux reportages sensationnalistes. L'un d'eux, Terror in Moscow (un titre digne d’un roman d’espionnage !) de Dan Reed, raconte minute par minute, au moyen d’images inédites tournées à l’intérieur même du lieu de l’action, la prise d’otages du théâtre de Moscou en octobre 2002. Ni polémique ni réflexif, ce reportage se contente d’une approche événementielle des faits, ce qui le rend à la fois très accessible et très creux.

The 3 Rooms of Melancholia traite du thème de la guerre. Découpé en trois parties distinctes (les trois « chambres » du titre), ce long-métrage de 106 minutes aborde le conflit en Tchétchénie sous l’angle esthétique, laissant en priorité la parole aux images. La réalisatrice finlandaise Pirjo Honkasalo a d’abord posé sa caméra dans une école de futurs officiers russes, à Kronstadt, non loin de St. Petersbourg, pour y dénoncer la robotisation et l’exploitation, à des fins guerrières, d’une jeunesse miséreuse et sans repères, puis est partie pour Groznyï, la capitale tchétchène, filmer les dégâts de l’Armée Rouge avant de se rendre en Ingouchie, petite province musulmane frontalière de la Tchétchénie, prendre le pouls d’une population bien décidée à préserver ses traditions et à faire face à l’ennemi.

Angel Guts, ou l'art du viol

Ayant retrouvé dans mon gourbi une sublime édition britannique des cinq titres composant la série Angel Guts, que j’avais ramenée une année du Far East Film Festival d’Udine, j’ai entrepris de regarder l’ensemble d’une traite. Une vraie découverte.


Angel Guts, qui appartient au genre typiquement nippon du "pinku eiga" (historiettes violentes à fort potentiel érotique), a été produite entre 1978 et 1988 par la firme Nikkatsu, plutôt orientée vers les polars et les films de sabre. A l’origine de cette série se trouve Takashi Ishii, qui venait alors d’intégrer la Nikkatsu comme scénariste. L’occasion lui sera donnée de réaliser le cinquième et dernier volet de la saga, Red Vertigo, probablement le plus troublant avec son histoire de salary man au bout du rouleau qui, ayant renversé une infirmière (Nami) violée par ses patients, entreprend de la violer à son tour avant que cette dernière ne se donne à lui avec passion. Curieusement, c’est au cours de cet ultime épisode que les scènes de sexe sont les plus explicites, obligeant la censure à cacher les parties génitales par un effet de flou, comme cela est encore de mise au Japon. Car malgré les nombreuses séquences de nudité qui jalonnent les quatre volets précédents, pas un seul poil pubien ni le moindre bout de pénis n’apparaissent à l’écran. Il faut d’ailleurs voir avec quel talent les comédiens se contorsionnent pour cacher méthodiquement ces parties de leur anatomie.

Outre un thème récurrent (le viol) et une couleur prédominante (le rouge), la continuité de la série est assurée par le personnage de Nami Tsuchiya, interprété par une comédienne toujours différente. De faire-valoir anecdotique dans le premier opus High School Co-ed (une lycéenne malmenée par un voyou), elle gagne dès le second le statut de personnage principal pour ne plus le quitter. Dans Red Classroom, réalisé comme le précédent par Chusei Sone, elle est une comédienne de bandes érotiques clandestines qui suscite la convoitise d’un rédacteur de revue pornographique. A noter que ce dernier se nomme Muraki, un patronyme qui deviendra lui aussi récurrent dans les opus suivants. Dans le bien-nommé Nami de Noboru Tanaka (l’un des chantres du "roman porno"), elle est une journaliste travaillant pour un magazine féminin qui, partant à la rencontre de femmes victimes de viols, est assaillie par des cauchemars et des hallucinations. Dans Red Porno de Toshiharu Ikeda, elle est une modeste employée qui, forcée de poser nue pour une revue sadomasochiste, est poursuivie par un amateur fanatique.

A l’exception de High-School Co-ed, qui se démarque des quatre suivantes par une intrigue ayant plutôt trait au film d’action (trois voyous adeptes du viol s’entredéchirent sitôt que l’un d’entre eux entreprend de rentrer dans le droit chemin), toutes ces histoires se ressemblent. De courte durée (entre 65 et 90 minutes), elles sont surtout un terrain d’expérimentation idéal pour des cinéastes en quête de voyeurisme. Sur ce terrain, Red Porno va très loin, avec cette demoiselle se faisant jouir avec des mines de crayon et le pied d’une table retournée, laissant écouler un liquide jaunâtre le long des préservatifs. Pour chaque disque, l’éditeur Artsmagic, le grand spécialiste anglais du Japon (par ici le site), nous gratifie d’un entretien avec Takashi Ishii. Je ne peux que vous recommander ce coffret.

mardi 13 mai 2008

French Gore in Rue Morgue

L'excellente revue canadienne en anglais Rue Morgue consacre une large partie de son numéro du mois de mai au nouveau cinéma d'horreur français, via des œuvres radicales telles que A l'intérieur et Frontières(s). A propos, j'ai eu l'occasion de voir ce dernier film récemment, et dans le genre "racailles de banlieues perdues chez les pèquenots dégénérés", j'ai largement préféré Sheitan. Bref, que Rue Morgue, qui est avec Fangoria l'une des plus respectables revues nord-américaines de cinéma fantastique, se penche avec aplomb sur notre mouvance horrifique actuelle, doit sans doute vouloir dire que cette "Nouvelle Vague" est peut-être moins anecdotique et plus intéressante que ce qu'en dit notre presse nationale. De là à penser que les Américains sont plus aptes que nous à apprécier les tentatives des talents français, il n'y a qu'un pas que je n'oserais franchir, de peur de froisser quelques pseudo-journalistes spécialisés qui ont fait de la francophobie systématique leur crédo. Voici ci-dessous le résumé du chapitre de Rue Morgue consacré au cinéma de genre hexagonal : "A handful of young French filmmakers are re-invigorating the genre with films that are both beautiful and bloody. Rue Morgue interviews the latest practitioners of Franco gore movies, with a look at the pregnancy-themed slasher Inside, from newcomers Alexandre Bustillo and Julien Maury, as well as the politically conscious survival horror Frontier(s). Plus: Interviews with the female anti-scream queen stars of both films, reviews of recent fright films from France, and more!"

Under The Bed Films, l'éditeur qui tache

En France, nous avons les Orléanais de Uncut Movies, spécialistes du film dégoûtant. Aux Etats-Unis, les éditeurs sont nombreux à se positionner sur le créneau "underground hard-gore". L'un d'entre eux a particulièrement attiré l'attention de L'Antre de la Bête : Under the Bed Films.

Il faut dire que j'ai eu l'occasion de voir il y a quelques mois un film issu du fort alléchant catalogue de cet éditeur californien. Werewolf in a women’s prison de Jeff Leroy conte, comme son titre l’indique, le carnage commis par un loup-garou dans une prison pour femmes. La genèse de cette histoire est toute simple : une belle donzelle, qui fait du camping sauvage avec son petit ami, est mordue par une bestiole féroce ressemblant à un loup-garou (comprendre "acteur dissimulé dans une combinaison poilue avec des yeux rouges clignotants"). Accusée du meurtre de son cher et tendre mis en pièces par la bête, elle est enfermée dans le pénitencier d’une république bananière, tenu par des militaires en rut. La nuit venue, elle se transforme en loup-garou, décimant l’intégralité du casting féminin, qui ne voit pas arriver le danger, trop occupé à se léchouiller les nibards. Entre scènes lesbiennes et démembrements artisanaux, c’est la grande rigolade. Et des éclats de rire, il y a sûrement de quoi s'en payer d'autres si l'on scrute avec attention le catalogue de Under The Bed Films (quelle appellation géniale, soit-dit en passant !), dont une partie est visible sur l'espace MySpace de l'éditeur. On y trouve notamment Fearmakers de l'Allemand Timo Rose avec la volcanique Debbie Rochon et The Deepening avec le notre tronçonneur islandais préféré Gunnar Hansen. Tous les visages actuels du film d'horreur clandestin portent la bannière Under The Bed Films, même l'égérie gothique du genre Tiffany Shepis est de la partie dans le bien-nommé Dorm of the Dead. Si l'on exclue les ménagères de 30 à 85 ans, les électeurs de Philippe de Villiers, les fanatiques de Jean-Luc Reichmann sur TF1, les 19 millions de benêts qui sont allés voir Bienvenue chez les ch'tis Débiles au cinoche et tous ceux qui n'ont pas Internet à la maison, il y a peu de chance que les friandises mentionnées plus haut trouvent une quelconque audience en France...

lundi 12 mai 2008

L'Iran quasi-absent à Cannes : y a-t-il danger ?

Cette année au festival de Cannes, l’Iran ne sera représenté que par deux films : The Lonely Tunes of Tehran de Saman Salour à la Quinzaine des Réalisateurs et 10+4 de Mania Akbari, la sublime actrice de 10 d’Abbas Kiarostami, dans la très anecdotique sélection de l’ACID. Faut-il s’inquiéter de cette exceptionnelle quasi-absence du cinéma d’auteur persan dans un festival qui a pourtant pris l’habitude de s’en faire la vitrine occidentale ? Ces films n’apparaîtraient-ils pas comme des choix imposés, comme une façon de ne pas déroger à la règle ? Si l’on considère le festival de Cannes comme un baromètre de l’état de la cinématographie mondiale, alors les questions ci-dessus méritent d’être posées. Dans leur dernier numéro du mois de mai, les Cahiers du Cinéma publient un article édifiant sur la manière dont les nouvelles autorités iraniennes interviennent dans la prétendue "conformité" du cinéma national, exerçant une censure de plus en plus drastique. Faut-il s’en étonner ? Avec l’islamiste haineux Ahmadinejad au pouvoir, il était prévisible que la légitimité de l’industrie cinématographique iranienne fût remise en question. Suite à l’ingérence des autorités dans la programmation du dernier festival de Fajr à Téhéran, plusieurs personnalités du Septième Art iranien ont adressé une lettre à leur Ministère de la Culture, dont un extrait est judicieusement reproduit dans les pages des Cahiers. Les signataires du manifeste dénoncent un pouvoir qui, "au lieu de l’aider à se développer sur le plan national et international, (a) décidé de marginaliser le cinéma d’auteur, et même de le supprimer des écrans nationaux". Ils insistent sur le fait que "le cinéma a été le moyen le plus important pour faire connaître la culture iranienne dans le monde entier », et que « même lorsqu’il est critique, il est au service du développement culturel" du pays. Ce dernier point est très important. La qualité jamais démentie du cinéma d’auteur iranien, à travers des cinéastes tels que Kiarostami, Jafar Panahi, Mohsen et Samira Makhmalbaf, Abolfazl Jalili, Ibrahim Forouzesh, Hassan Yektapanah et leur regard moderne et critique sur l’Iran d’aujourd’hui, a sans doute convaincu beaucoup d’Occidentaux de se rendre dans cette nation empreinte de fascinantes contradictions.

Cet article fait écho à celui concernant l’Iran paru au même moment dans le traditionnel Atlas annuel du Cinéma des Cahiers. Mamad Haghighat (photo ci-contre), véritable institution francophone du cinéma persan, critique, propriétaire d’une salle de cinéma parisienne et quelquefois cinéaste*, dresse un bilan très critique de l’année 2007 en Iran, où sur les 105 films produits (à peine moins qu’en Italie), 48 seulement ont été distribués en salles. La suprématie de la cinématographie nationale dans un pays extrêmement protectionniste en matière de culture, a néanmoins permis quelques beaux succès aux productions populaires, incitant Haghighat à s’inquiéter plutôt de l’émergence d’un cinéma « islamiquement correct ». C’est une vision en somme plus optimiste que celle que l’arrivée au pouvoir des ultraconservateurs laissait présager, car elle prédit malgré tout la survie d’une industrie cinématographique en Iran. Permettons-nous toutefois d’émettre quelques réserves, quand on sait que dans les pays appliquant un Islam strict (comme tous ceux de la péninsule arabique), le cinéma n’existe pas, faute d’autorisation.

* On se souvient de son remarquable Deux Anges, présenté à la Semaine Internationale de la Critique en 2003

dimanche 11 mai 2008

Les Révoltés de l'an 2000 chez Wild Side

C'est une pièce maîtresse du cinéma fantastique espagnol que Wild Side sortira en DVD à partir du 4 juin prochain : Quièn puede matar a un niño, alias Les révoltés de l'an 2000 (1976), deuxième et, pour l'heure, dernier long-métrage de cinéma de Narciso Ibañez Serrador après le tout aussi indispensable La Résidence (1969), déjà disponible chez René Chateau Vidéo. Serrador s'est fait un nom à la télévision, pour laquelle il a écrit et réalisé plusieurs épisode de la série Historias para no dormir (histoires pour ne pas dormir) entre 1965 et 1982. Il a récemment initié une nouvelle saison de cette série sous le titre Pelìculas para no dormir, dont les six épisodes, réalisés par les plus grands noms du nouveau cinéma fantastique ibérique, ont été édités chez nous par One Plus One.

samedi 10 mai 2008

Pierre Gérald, doyen des acteurs français

Rendons à César ce qui est à César ! Suite à l'article sur Paulette Dubost, un internaute m'a fait remarqué dans un commentaire laissé sur ce blog que le doyen actuel des comédiens français n'était pas l'actrice pré-mentionnée mais un certain Pierre Gérald, désormais âgé de 102 ans, duquel on peut voir quelques photographies récentes sur le site écolo Cybelter (dont provient la photo illustrant cet article). Parisien pur souche né en 1906, Pierre Gérald, de son vrai nom Victor Haïm Cohen, n'a toutefois pas connu la même carrière que la grande Paulette. Essentiellement comédien de théâtre, ayant assisté aux représentations de Sarah Bernhardt et côtoyé Pierre Fresnais, il n'est arrivé au cinéma que très tardivement, dans les années 90. Il est apparu dans un épisode de la série Highlander, puis chez Jean-Pierre Mocky et dans une poignée d'autres films de cinéma où ses personnages se nomment simplement "le vieil homme" ou "le vieillard". Dernièrement, il a joué le grand-père de Romain Duris dans Les Poupées Russes et, passés 100 ans, dans Ensemble, c'est tout de Claude Berri. Je remercie chaleureusement cet internaute de m'avoir révélé ce comédien, dont j'ignorais jusqu'à présent l'existence. Justice est rendue...

Décès de l'artiste country Eddy Arnold

Nos médias ne s'en sont pas faits l'écho, rien d'étonnant à cela étant donné le peu d'intérêt que suscite la musique folklorique nord-américaine sous nos tristes latitudes. Après Porter Wagoner il y a quelques mois, c'est un autre géant de la "country music" qui s'en est allé. Eddy Arnold, inoubliable interprète des standard The Cattle Call et You don't know me, maintes fois utilisés dans les BO de films, est mort ce jeudi 8 mai à l'âge respectable de 89 ans. So long, Eddy...

dimanche 4 mai 2008

Abduction : le "cas" Patty Hearst par Joseph Zito

Malgré un banc-titre d’introduction qui avertit que "le film n’entretient aucun rapport avec des évènements réels", il paraît évident que Abduction s’inspire de "l’affaire Patty Hearst", d’autant plus que le titre français utilisé par Socai pour l’exploitation vidéo est on ne peut plus explicite (voir visuel). Patricia Hearst, enlevée dans le courant du mois de mai 1974 par un groupuscule gauchiste, était la petite-fille du magnat de la presse William Randolph Hearst, celui-là même qui avait inspiré Orson Welles pour son Citizen Kane. Au lieu d’exiger une rançon, les ravisseurs avaient demandé à la famille Hearst de distribuer des vivres aux pauvres. Le cas Hearst restera dans les annales comme l’une des plus étonnantes manifestations du fameux "syndrome de Stockholm", phénomène pathologique qui convertit les victimes d’enlèvements à la cause de leurs ravisseurs. Objet récemment d'un excellent documentaire sur Arte, ce qu’il convient d’appeler "l’affaire Patty Hearst" inspirera de multiples films, dont Cecil B. DeMented de John Waters, avec Melanie Griffith en star de ciné combattant aux côtés de ses tortionnaires. Pas étonnant d’ailleurs que Waters se soit finalement laissé tenté par le sujet, lui qui a désormais pris l’habitude de faire jouer Patricia Hearst dans ses films.

Bref, dès l’épilogue du feuilleton, qui voit Patty Hearst libérée et la plupart des ravisseurs abattus par la police, le cinéma souhaite s’emparer du fait-divers. A ce titre, la Palme de l’opportunisme revient à notre ami Joseph Zito, qui dès 1975 réalise un premier long-métrage intitulé Abduction. Avant de devenir le Joseph Zito que l’on connaît, efficace pourvoyeur de séries B bien torchées (Rosemary’s Killer, le quatrième Vendredi 13, deux Chuck Norris, un Dolphy Lundgren), il se lance dans l’adaptation officieuse du drame qui a passionné l’Amérique. Mais comment faire quand on n’a pas l’autorisation d’utiliser les patronymes des protagonistes ? L’aubaine, c’est que l’année précédant l’affaire, un bouquin signé Harrison James, Black Abductors, est paru en librairie. Un ouvrage qui, selon certaines sources, raconte comment un quatuor de jeunes révolutionnaires kidnappe la fille d’un puissant promoteur immobilier pour obliger ce dernier à détruire le luxueux complexe qu’il fait bâtir sur un site écologique, et comment la fifille, tombée amoureuse de l’un des illuminés, renie son paternel et prend fait et cause pour les kidnappeurs. Et comme l’héroïne du livre s’appelle aussi Patricia, c’est tout bénef ! Aidé par une solide distribution composée de jeunes comédiens motivés (un premier rôle pour Judith-Marie Bergan, très convaincante dans le rôle de Patricia) et de vieux routards fatigués (Leif Erickson et Dorothy Malone jouent les parents, Lawrence Tierney un agent du FBI), Zito déroule sans trop se forcer ce qui fera sa renommée quelques années plus tard : du sexe et de l’action. Ainsi s’attarde-t-il avec une saine complaisance sur les viols subis (consentis ?) par Patricia et montre-t-il déjà un goût certain pour les impacts de balles au cours d’une séquence fort réussie de fusillade en forêt. Le reste est anecdotique, comme le film d'ailleurs, sympathique témoignage d’une époque. L’acteur Greg Rozakis, qui incarne le ravisseur chevelu, mourra du SIDA en 1983.

samedi 3 mai 2008

Bagman : Horreur sur le Saint-Laurent 2

Si vous aimez le gore excessif, tellement excessif qu'il en devient drôle, je vous invite à découvrir Bagman, Profession : Meurtrier, un court-métrage québécois d'une vingtaine de minutes authentiquement jusqu'au-boutiste, dans lequel un fou furieux dissimulé sous un sac à patates décime une bande de jeunes débiles dans les rues de Montréal. Au programme : égorgements, éventrements, membres sectionnés, tête réduite d'un coup de pelle et autres joyeusetés effectués sans état d'âme dans le délire le plus complet. La chose a été commise en 2004 par un collectif du nom de Roadkill Superstar, responsable d'une poignée d'autres courts-métrages tous aussi excessifs qui figurent sur un DVD rarissime que j'ai l'infime honneur de posséder. L'un d'entre eux, Chez Tony Spaghetti, conte le carnage commis dans un restaurant italien. C'est à mourir de rire. Si vous souhaitez vous faire une idée de la bestiole, rendez-vous sur le site www.lebagman.com