Malgré un banc-titre d’introduction qui avertit que "le film n’entretient aucun rapport avec des évènements réels", il paraît évident que Abduction s’inspire de "l’affaire Patty Hearst", d’autant plus que le titre français utilisé par Socai pour l’exploitation vidéo est on ne peut plus explicite (voir visuel). Patricia Hearst, enlevée dans le courant du mois de mai 1974 par un groupuscule gauchiste, était la petite-fille du magnat de la presse William Randolph Hearst, celui-là même qui avait inspiré Orson Welles pour son Citizen Kane. Au lieu d’exiger une rançon, les ravisseurs avaient demandé à la famille Hearst de distribuer des vivres aux pauvres. Le cas Hearst restera dans les annales comme l’une des plus étonnantes manifestations du fameux "syndrome de Stockholm", phénomène pathologique qui convertit les victimes d’enlèvements à la cause de leurs ravisseurs. Objet récemment d'un excellent documentaire sur Arte, ce qu’il convient d’appeler "l’affaire Patty Hearst" inspirera de multiples films, dont Cecil B. DeMented de John Waters, avec Melanie Griffith en star de ciné combattant aux côtés de ses tortionnaires. Pas étonnant d’ailleurs que Waters se soit finalement laissé tenté par le sujet, lui qui a désormais pris l’habitude de faire jouer Patricia Hearst dans ses films.
Bref, dès l’épilogue du feuilleton, qui voit Patty Hearst libérée et la plupart des ravisseurs abattus par la police, le cinéma souhaite s’emparer du fait-divers. A ce titre, la Palme de l’opportunisme revient à notre ami Joseph Zito, qui dès 1975 réalise un premier long-métrage intitulé Abduction. Avant de devenir le Joseph Zito que l’on connaît, efficace pourvoyeur de séries B bien torchées (Rosemary’s Killer, le quatrième Vendredi 13, deux Chuck Norris, un Dolphy Lundgren), il se lance dans l’adaptation officieuse du drame qui a passionné l’Amérique. Mais comment faire quand on n’a pas l’autorisation d’utiliser les patronymes des protagonistes ? L’aubaine, c’est que l’année précédant l’affaire, un bouquin signé Harrison James, Black Abductors, est paru en librairie. Un ouvrage qui, selon certaines sources, raconte comment un quatuor de jeunes révolutionnaires kidnappe la fille d’un puissant promoteur immobilier pour obliger ce dernier à détruire le luxueux complexe qu’il fait bâtir sur un site écologique, et comment la fifille, tombée amoureuse de l’un des illuminés, renie son paternel et prend fait et cause pour les kidnappeurs. Et comme l’héroïne du livre s’appelle aussi Patricia, c’est tout bénef ! Aidé par une solide distribution composée de jeunes comédiens motivés (un premier rôle pour Judith-Marie Bergan, très convaincante dans le rôle de Patricia) et de vieux routards fatigués (Leif Erickson et Dorothy Malone jouent les parents, Lawrence Tierney un agent du FBI), Zito déroule sans trop se forcer ce qui fera sa renommée quelques années plus tard : du sexe et de l’action. Ainsi s’attarde-t-il avec une saine complaisance sur les viols subis (consentis ?) par Patricia et montre-t-il déjà un goût certain pour les impacts de balles au cours d’une séquence fort réussie de fusillade en forêt. Le reste est anecdotique, comme le film d'ailleurs, sympathique témoignage d’une époque. L’acteur Greg Rozakis, qui incarne le ravisseur chevelu, mourra du SIDA en 1983.
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