Jean-Pierre Mocky, que l'on sait inusable et prolifique, ne connait plus les honneurs des grandes sorties nationales depuis déjà belle lurette. En marge de cette marginalité, un film n'est carrément pas sorti du tout. Ça s’appelle Les ballets écarlates. Un film « choc » sur les réseaux pédophiles en France. Un film tellement insoutenable que le Ministère de la Culture l’aurait interdit, réveillant ainsi les vieux démons de la censure politique. Après avoir jugé sur pièce (car le film est sorti en DVD), on se demande plutôt si l’interdiction supposée n’était pas en fait destinée à épargner au spectateur la vision d’un film excessivement mauvais.
Jean-Pierre Mocky multiplie ces dernières années les longs-métrages, non pour courir après une gloire passée mais simplement par amour pour un Septième Art français dont il restera l’un des plus atypiques représentants. Sans le sou mais jamais à court de synopsis, il alterne depuis une quinzaine d’années les projets bâclés et d’autres plus ambitieux, toujours en marge du système de distribution. Complètement retombé dans l’anonymat au début des années 2000, il refuse de partir à la retraite et tourne, dans son coin, une succession de bandes fauchées, interprétées par lui-même et quelques vieux complices, faute de pouvoir se payer des têtes d’affiches. Des films pour la plupart descendus par la presse et presque exclusivement projetés au Brady, emblématique salle parisienne dont il est devenu propriétaire. En l’espace de deux ans (2000-2002) Mocky réalise cinq films passés inaperçus ou presque : Tout est calme, La candide Mme Duff, Le glandeur, La bête de miséricorde et Les araignées de la nuit. Finalement, grâce à son obstination et sa forte personnalité, relayées par d’opportunistes interventions télévisées, il réussit à convaincre d’anciens camarades et d’autres, prêts à sacrifier leur cachet habituel pour «s’essayer à du Mocky», de participer à ses nouveaux projets. C’est ainsi que Villeret cabotine avec bonheur dans Le Furet, que Solo et Le Bolloc’h se font plaisir dans Le Bénévole et que Berling flagelle son image d’acteur intellectuel dans Grabuge. Trois friandises auxquelles participe également un Michel Serrault en roue libre qui n’a plus rien à perdre. Mais, boulimique et surtout toujours prêt à en découdre avec la bienséance, Jean-Pierre Mocky ne peut pas se contenter de ces faux films de genre suant la naphtaline. Alors, quand l’envie lui prend, il revient à des projets plus confidentiels. Piochant son sujet dans le fait-divers sordide*, Mocky décide de s’attaquer aux réseaux pédophiles avec Les Ballets écarlates. Un film dont personne n’a voulu. Le blog Le Coin du Cinéphage explique assez précisément la genèse du projet, sur laquelle je ne reviendrai pas (voir par-ci) et en fait une critique plutôt élogieuse, sur laquelle par contre il convient de revenir. Car si Les Ballets écarlates a été privé de distribution, ou plutôt « censuré » selon le cinéaste, c’est parce que le sujet risquait de provoquer le scandale. Pensez donc, voir des marmots se promener en slip dans une bâtisse isolée sous l’œil pervers des notables du coin !
Voyons-y maintenant de plus près. L’objet de la discorde a en effet été édité en DVD par Pathé dans le cadre de son intégrale Mocky, et se trouvait donc là, perdu dans la vidéothèque de l’Institut Français de Bucarest, attendant qu’un inconscient se risque à l’emprunter. Cet inconscient, c’était moi, bien évidemment… Pathé, et son patron Jérôme Seydoux, auxquels le réalisateur semble vouer une reconnaissance sans borne. Curieuse association, soit dit en passant, que celle de l’iconoclaste Mocky, franc-tireur du cinéma franchouillard, incorruptible et marginal, avec la maison Pathé, grande propagatrice du cinéma pop-corn et fossoyeuse de nos petits ciné d’art et essai. Enfin bref, passons… Dans une petite commune de la Vienne, des enfants sont enlevés à leurs parents et jetés en pâture aux pédophiles dans une vaste demeure. L’un d’entre eux parvient à s’enfuir et atterrit, par un hasard suspect, chez la mère d’un des bambins disparus. Aidé de l’armurier du village, celle-ci s’en va nettoyer la cité de sa bourgeoisie débauchée. Voilà en somme un sujet qui prête à tout sauf à sourire. Mais submergé par un sujet trop ambitieux pour ses maigres moyens, Mocky se noie. Les seconds rôles abondent, mais les comédiens, qui n’ont à leur actif que leur faciès télégénique (on retrouve les habituels copains de cuvée de Mocky, Dominique Zardi, Jean Abeillé, Jean-Pierre Le Cloarec…), sont incapables de les rendre crédibles. A une scène vaguement réussie succède aussitôt une scène complètement ratée (les blessures par balle ne provoquent aucun saignement, étrange…). Les enfants, bien loin d’incarner le calvaire de leur personnage, ont du mal à retenir leur sourire en passant devant la caméra. L’image est bâclée… La liste des imperfections est longue et, à défaut de provoquer le malaise, le film finit par susciter un mélange d’amusement et d’indignation. On a beau apprécier le style Mocky, et croyez-moi, j’en suis, on ne peut que condamner l’entreprise. Oublions ça, car Mocky a ensuite réalisé 13 French Street, renouant avec une distribution de qualité (Frémont, Novembre, Solo). Et je suis impatient de découvrir la bête…
1 commentaire:
on s'en fout royalement de l'interpretation. Ce que veut
montrer MOCKY, c'est l'existence réelle de réseaux pédocriminels
bien organisés au plus au niveau de
l'état.
Pratique immonde de la haute société qui consomment
des enfants comme certains consomment des carambars.
La qualité artistique du film n'est rien face au constat terrible d'une société qui a abandonné ces enfants à ces
prédateurs criminels.
Certains ont décidé de ROMPRE
LE SILENCE pour traduire ces raclures en JUSTICE ( on n'en trouve bcp içi aussi).
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